A l’image de l’Europe, la Suisse intensifie ses efforts pour lutter contre la fraude à la TVA, en particulier dans le secteur du commerce électronique. Dès Janvier 2025, une nouvelle réglementation entrera en vigueur, avec un objectif double : responsabiliser davantage les marketplaces dans la gestion de la TVA et instaurer une équité entre les entreprises locales et les entreprises étrangères opérant sur le marché suisse. Désormais les plateformes de vente en ligne joueront un rôle clé en devenant redevables de la TVA sur certaines transactions qu’elles facilitent. Avec cette modification, la Suisse s’aligne sur les efforts européens pour mieux répondre aux exigences du e-commerce international et réduire la fraude à la TVA.
Comment la Suisse tente de lutter contre la fraude à la TVA depuis plusieurs années déjà ?
Cette nouveauté 2025 s’inscrit dans une démarche qui a débuté dès 2018 pour lutter contre la fraude à la TVA et remettre sur un pied d’égalité les sociétés locales suisses des sociétés étrangères qui opèrent sur le marché suisse. Jusqu’alors, les sociétés étrangères bénéficiaient d’une simplification réglementaire qui créait un avantage déloyal par rapport aux sociétés suisses. En effet, les sociétés étrangères pouvaient réaliser un chiffre d’affaire de CHF 100 000 sur le territoire suisse avant de s’interroger sur les problématiques de TVA. Cela engendrait des transactions sans TVA alors qu’une société suisse qui réalisait la même transaction aurait dû facturer de la TVA suisse.
En réponse à cette problématique, l’administration fiscale suisse, l’AFC, a instauré un changement drastique. Dès 2018, ce n’est plus le chiffre d’affaire réalisé sur le territoire suisse qu’il faut prendre en compte mais bien le chiffre d’affaire global de la société étrangère pour déterminer ses obligations à la TVA. Ce changement a imposé à de nombreuses sociétés étrangères de s’identifier à la TVA.
En 2019, l’administration fiscale suisse a apporté une clarification concernant les « petits envois » qui sont définis par les marchandises vendues dont le montant de la TVA n’excède pas CHF 5. Certes, ces marchandises jouissent d’une exonération de TVA à l’importation, il n’en reste pas moins que les sociétés étrangères peuvent quand même avoir des obligations fiscales.
Lorsqu’une société étrangère réalise un chiffre d’affaire en Suisse supérieur à CHF 100 000, celle-ci doit facturer de la TVA sur ses ventes.
Malgré ces efforts, il restait encore bon nombre de sociétés étrangères qui ignoraient ces règles et facturaient sans TVA. L’administration a donc décidé de renforcer les règles pour apporter une solution aux sociétés étrangères qui vendent via l’intermédiaire de marketplaces tout en augmentant le taux de conformité des ventes destinées aux particuliers suisses.
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Comment comprendre le périmètre de cette réforme et les obligations ?
Tout d’abord, il est essentiel de poser un cadre à cette nouvelle réforme. Elle ne concerne que les sociétés qui vendent par l’intermédiaire d’une marketplace et uniquement la vente de marchandises. La vente de prestations de service en est, pour le moment, exclue.
Qu’est-ce qu’une marketplace selon la réglementation suisse ?
Cette définition a fait l’objet de nombreuses critiques lors de la consultation publique avant la mise en application de cette réforme. La notion de marketplace n’était pas assez claire. L’AFC a donc apporté une définition beaucoup plus poussée et celle-ci rejoint parfaitement la définition européenne du fournisseur présumé. Il s’agit d’une plateforme qui facilite des transactions entre un vendeur et un consommateur suisse et qui intervient sur plusieurs aspects des transactions dont la prise de commande et le paiement par exemple. Il est important de noter qu’une plateforme qui n’intervient que sur un seul aspect comme le processus de paiement ou la fourniture de prestations de publicité ne sera pas concernée par cette réforme.
Quelles sont les obligations qui découlent de cette nouveauté ?
Dès lors qu’une marketplace rentre dans le champ d’application de la réforme, elle aura l’obligation de s’identifier à la TVA dès dépassement du seuil de chiffre d’affaire global. Au-delà de l’obligation, les plateformes qui réalisent un chiffre d’affaire en-deçà du seuil auront la possibilité de s’identifier à la TVA sur la base du volontariat afin de simplifier les démarches des vendeurs et ouvrir les portes d’un nouveau marché porteur sans contrainte administrative.
Une fois l’enregistrement effectué, la marketplace pourra :
- Agir en qualité d’importateur sur le document de douane ;
- Collecter la TVA sur les ventes réalisées par leur intermédiaire, la déclarer et la reverser auprès de l’administration fiscale en lieu et place du vendeur initial. Ce dernier reste tout de même solidairement responsable du paiement de la dette fiscale.
En cas de non-respect de ces obligations d’enregistrement, de déclarations et de reverse de l’impôt, l’administration douanière se réserve le droit de refuser l’entrée sur le territoire de la marchandise voire de la détruire.
Quels sont les impacts pour les e-commerçants et pour les marketplaces ?
Une fois cette réglementation maitrisée, il convient de déterminer les impacts pour les vendeurs mais aussi pour les marketplaces.
Côté vendeur, il convient d’identifier le canal de vente pour déterminer les obligations liées à la TVA. En effet, le risque serait de payer la TVA deux fois : une fois via la plateforme et une autre fois sur la déclaration de TVA suisse du vendeur. Comme le vendeur reste solidairement redevable du paiement, il est essentiel de confirmer que la marketplace a bien anticipé ces changements et qu’elle reversera bien la TVA pour son compte. Le vendeur reste, bien entendu, redevable de la TVA sur les ventes réalisées via son propre site.
Dans la pratique, certaines marketplaces ne veulent pas agir en qualité d’importateur des marchandises et exigent à leurs vendeurs de s’identifier à la TVA en Suisse. C’est notamment le cas de la plateforme Manor. Dans ce contexte, le vendeur prendra en charge la TVA sur les importations et pourra se faire rembourser de cette dernière via sa déclaration suisse.
Côté marketplace, il est important de bien appréhender ces changements pour s’assurer du respect de cette nouvelle réglementation. Cela comprend un enregistrement à la TVA et une configuration spécifique pour appréhender les exigences d’importation, une facturation conforme en lieu et place du vendeur et la reverse de l’intégralité de la TVA.
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